vendredi 21 novembre 2014

Ma vie de styliste #1

Cela fait plusieurs fois déjà que l'on me demande de faire un article sur mes études et sur mon métier. J'ai longtemps hésité à le faire car il y a 2 sujets que je n'aborde jamais ici : ma vie privée (amoureuse ou familiale) et ma vie professionnelle. Et ce, pour la même raison pour laquelle je ne montre pas ma tête : je ne cherche pas à être reconnue (ni même connue). L'internet belge et la mode belge sont des milieux tous petits, et cela me gêne encore toujours, après 3 ans de blogging, de dévoiler entièrement qui je suis. Le boulot ne sait donc pas que j'ai un blog, et le blog ne savait pas jusqu'ici en quoi consistait mon boulot. D'une certaine façon, je me protège. Mais j'ai repensé à la question et ce qui m'a fait changer d'avis c'est que je me suis dit que peut être, cela pourrait encourager certaines, donner des idées, et même, éclairer des lanternes. Parce que oui, je suis styliste, et c'est un métier qui en laisse pas mal curieux, voir parfois rêveur.

dessin odile sacoche copyright


Tout a commencé quand j'étais en primaire. A cet époque, il y avait 2 choses que j'étais sûre de savoir faire et pour lesquels j'éprouvais une certaine confiance en moi : le dessin et l'écriture. Quelques années plus tard, pour mes 13 ans, lorsqu'il a fallut choisir une option à l'école j'ai su directement celle que je voulais : art. Puis, est arrivée dans ma classe une espagnole. Si je me rappelle si bien d'elle c'est parce que c'est elle qui m'a appris à dessiner les figurines de mode. A ce moment là je ne savais pas du tout ce que c'était et c'est en montrant mes dessins que, mon frère je crois, m'a dit que ce que je faisais c'était du stylisme. J'avais alors 14 ans, et à ce moment là, je savais ce que je voudrais faire plus tard : styliste.

Je me rappelle encore que quand je l'ai dit à ma maman, au début elle n'était pas très chaude pour cette idée. Moi qui avait certaines facilités à l'école, je pense qu'elle me voyait plutôt avec une carrière d'universitaire. Mais je n'en démordais pas, je voulais être styliste. Je passais mes soirées à dessiner, à copier des modèles vus dans des BD de science fiction que j'adorais. Mes figurines de mode était tout ce que je n'étais pas : grandes, minces, avec des jambes interminables. Elles incarnaient tantôt la femme de soirée, tantôt la petite fille en pyjama. La littéraire ou bien l'aventurière. Quand je dessinais, je m'évadais. Je pouvais être qui je voulais.

Mais impossible de faire changer ma maman d'avis. Elle avait peur qu'en choisissant une carrière artistique je finisse mal. Il y a encore toujours cet espèce du cliché de l'artiste raté, tatoué, percé, drogué avec des cheveux de toutes les couleurs. Mais je me suis battue pour mes idées et nous avons passé un pacte elle et moi. Si je faisais l'option Math (6h) Science (5h) Langues (8h) , autrement dit l'option la plus forte de l'école où j'étudiais, j'aurais le droit de faire mes études de stylisme plus tard. Pour me familiariser à certaines techniques artistiques, moi qui ne connaissais que l'aquarelle depuis mes 7 ans, elle m'a alors inscrite dans une école d'art en extra scolaire.

J'étais une quiche en math, mais j'ai tenu bon. Tout ce qui comptais, c'était de rentrer le soir, finir mes examens, et dessiner. Comme je terminais mes interros toujours avant tout le monde (l'Univers m'a doté d'un don de rapidité assez puissant), mes profs pensaient que j'étais un cancre ou que je trichais. Mais non, je savais pourquoi j'étais motivée. Par la suite c'est devenu un petit jeu entre eux et moi, ils disaient qu'ils garderaient mes dessins pour le jour où je deviendrais célèbre.

Et puis est arrivé ce dernier jour dans ma classe de math. 17 ans. La fin des humanités. Le titulaire qui n'était autre que mon prof de math a alors décidé de faire un tour de classe pour savoir qui choisirait quoi comme étude l'année d'après. J'étais entourée d'ingénieurs et d'informaticiens. Quand est arrivé mon tour et que j'ai dit fièrement que je serais styliste, ça a jeté un froid. Un silence. Toujours ce fameux cliché. Mais autant dans la vie tout me tient à coeur et je souffre encore beaucoup du regard d'autrui, autant ça, je m'en foutais. Être styliste c'était vraiment (ça l'est toujours) ma vocation. Peu importe ce qu'on me dirait, je ne changerais pas d'avis !

Le pacte était rempli, j'avais réussi mes études et ma mère m'a alors inscrit comme promis dans une école de stylisme. A l'époque cela s’appelait encore Bischoffsheim. Aujourd'hui l'école a changé en Hautes Ecoles Francisco Ferrer. Je suis arrivée dans une classe de vrais artistes dont beaucoup venaient des humanités professionnelles. La théorie était assez facile pour moi de part mon option forte à l'époque, et la pratique l'était aussi car je savais que j'étais faite pour ça. J'étais comme un poisson dans l'eau. Beaucoup de mes copines de l'époque ont fait des nuits blanches pour rendre des travaux en temps et en heure, mais j'étais tellement heureuse d'être là, que tout a toujours été expédié pour moi. Et puis n'oublions pas mon super pouvoir : la rapidité.

Concrètement dans cet école on apprend plusieurs métiers. Celui de modéliste, de styliste et de patronnière. Pour faire simple, la styliste dessine le modèle, le crée. La modéliste fera une toile du modèle pour faire de cette création un modèle 3D. Et la patronnière fera les patrons papiers de ce modèle ainsi que la gradation (la gradation c'est ce qui permet d'avoir un même modèle en 36-38-40-42-44-46 etc....). J'ai donc appris les 3 métiers, mais de base, ma préférence s'est portée pour le stylisme et le dessin. Je ne suis pas assez manuelle pour le modélisme, et pas assez matheuse pour le patronnage. Si je le précise c'est que dès le début il est important de choisir où on veut aller. Par la suite, il est rare d'être engagée comme modéliste si on a fait que du stylisme et vice versa.

Pendant 3 ans donc, j'ai eu des cours de création papier, toile et tissu. Mais aucun cours de couture (oui je sais c'est une aberration). Je n'ai pas eu non plus de cours de dessin sur ordinateur (ce qui maintenant est au programme de cet école). J'ai du rendre des dossiers, dessiner des accessoires, construire des costumes pour le festival du film fantastique, faire un défilé complet de 5 modèles accessoirisés pour ma dernière année,.... Bien sûr il y a aussi eu les stages en entreprises, les cours de dessins, de croquis,.... Je pourrais t'en parler pendant des heures. Je dirais que l'école que j'ai faites est une école assez correcte bien que sa renommée ne soit pas aussi internationale que l'école d'Anvers ou de la Cambre.

A vrai dire, il ne m'est jamais venu à l'idée de faire la Cambre ou Anvers. Jamais venu à l'idée non plus de devenir célèbre, de créer ma marque. Cela n'a jamais été mon intention de vivre de gloire et de paillettes. Moi tout ce que je voulais finalement, c'était dessiner. Et c'était pour ça que j'étais douée : dessiner... Des vêtements...

(à suivre)

♥ ♥ ♥

Illustration : création propre non libre de droit !

10 commentaires:

  1. C est une des raisons pour laquelle j'ai laissé mes blogs, l'anonymat!
    Parce que j'avais peur de parler de choses trop perso et qu'on me "reconnaisse" et c est pas du tout ce que je voulais, comme toi pour me protéger. Ca me manque j 'avoue mais bon j ai fait un choix. Et je n'ai gardé que certains blog dans mes lectures dont le tien qui me parle vraiment. Par contre je trouve ca magique de changer de voie pro via un blog m'enfin ca c est une autre histoire.

    En tout cas c est vraiment génial de parler de ton métier, un métier créatif, un métier qui fais rêver ouais. En fait je suis admirative parce que j'aurais toujours adoré savoir ce que je voulais faire et à 30 ans j'en suis au même point: je ne sais pas et franchement c'est horrible ce sentiment. Un métier créatif, j'adore!

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    1. Je suis un peu le derrière entre deux chaises en ce moment. Disons que je suis à un moment où je dois "choisir" le blog, peut fonctionner, mais cela implique de sortir de l'anonymat. Ou tout doit rester comme ça. Du coup je sais pas, je fais des noeuds dans ma tête. La question est "que veux-je" de ce blog ? :)

      C'est vrai que j'ai su rapidement ce que je voulais faire. Je pensais que c'était normal, jusqu'à il y a peu, où on m'a dit que ce n'était pas donné à tout le monde de connaitre sa voie. On peut dire que ça, c'est une "chance".
      Courage tu finiras par trouver ce qui te fais vibrer

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  2. C'est pas simple effectivement après je comprend. Personnellement j'ai beaucoup accroché avec ton blog parce que tu te dévoiles, meme si tu ne parles pas de ta vie perso et pro, tu parles de toi, de ce que tu ressens, et c est ce que j'aime. Après moi j'avais peur qu'on "utilise" cela contre moi si jamais on découvrait qui se cachait derrière mon blog, je ne me sentais pas libre, je ne sais pas si je suis clair. ET c est ca qui me gêne et pourtant à la base j'adore bloguer.

    Et je confirme que non ce n est pas donné à tout le monde et que cela peut rendre très "malheureux".

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  3. C'est chouette de te découvrir un peu plus. Même si je connaissais ton boulot, c'est cool d'apprendre comment et pourquoi tu as décidé de faire ça. J'ai hâte d'en savoir plus aussi.

    J'étais comme toi à dessiner tout le temps, partout. Petite on me disait régulièrement que je serais styliste ou journaliste (j'adorais aussi écrire). Finalement, rien de tout ça, contrairement à toi, j'avais trop d'envies mais un gros frein avec mon handicap. Archéologue, astrophysicienne, chara designer, traductrice... Quoi qu'il en soit, mes études sont quand même restées en rapport avec l'art et les langues, j'en démordais pas ^^

    Puis d'un autre coté, le blog représente aussi un peu tout ça, "l'écriture et l'art" <3

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    1. Mais tu dessines toujours, non ?
      Contrairement à moi, qui ne dessine plus. Peut être parce que je dessine déjà toute la journée ? C'est pas complètement pareil sur l'ordinateur mais bon ...
      Je ne sais plus ce que tu fais dans la vie ? On en a déjà parlé je me souviens, mais je ne sais plus quand même #boulet

      C'est vrai que le blog est le complément au dessin : l'écriture ^^

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    2. Non pas vraiment, ça faisait des années que je n'avais pas tenu un crayon. J'ai eu envie d'en refaire un peu dernièrement, d'où les quelques portraits que t'as pu voir mais avant et depuis, rien ^^ Parfois ça me manque, parfois non.

      Dans ton cas, je comprends, c'est un peu comme la cuisine, quand tu en fais toute la journée et bien le soir, t'as plus envie d'en faire !

      Et dans la vie, finalement je suis dans l'informatique haha xD

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  4. Merci à toi mon chaton de nous dévoiler une partie de ta vie comme cela, c'est toujours du bonheur de te découvrir encore un peu plus.
    Plein de bisous.

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    1. Avec plaisir ma biche
      Mais tu connais déjà tout de moi ^^ Ou presque, nan ?

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  5. J'avais une copine à Bischoff aussi, j'ai toujours été impressionnée par la qualité (et quantité) de boulot qu'on lui demandait, les patrons, le travail de fin d'année....
    Merci d'avoir levé un coin du voile! (taffetas? organza? à toi de nous dire ^^)

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    1. Quantité je suis assez d'accord.
      Pour le voile je vois plutôt du voile de coton :p uhuh

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